Paroles paysannes. Bénin/Anacarde : Face à l’annulation des contrats internationaux, l’URCPA veut renforcer ses liens avec les transformateurs locaux
Entretien avec Mohamed Baranon, Directeur de l’Union régionale des coopératives de producteurs d’anacarde de l’Atacora Donga (URCPA-AD)
Quels sont les impacts de la crise sur les producteurs ?
La crise est survenue en pleine période de commercialisation. Nos producteurs vendent principalement à deux catégories d’acheteurs : les transformateurs locaux et les acheteurs nationaux sous contrat avec les exportateurs vietnamiens, indiens ou chinois, qui transforment la noix brute de cajou dans leur pays. Avec la fermeture des frontières, les contrats ont été annulés. Les prix ont chuté, passant de 325 FCFA/kg (prix plancher) à 200 FCFA ou 150 f CFA, largement en dessous du coût de production. Les producteurs ont bradé leurs récoltes.
Cela a-t-il des incidences sur la prochaine campagne ?
C’est pour pourvoir réinvestir dans leurs exploitations pour la nouvelle saison que 80% des stocks ont été vendus malgré les prix très bas. Tous les membres ont subi de fortes pertes de revenus durant deux mois. Certains, peu nombreux heureusement, avaient emprunté pour préfinancer l’entretien de leurs vergers. Il se trouvent en situation d’impayé auprès des banques de la place, elles-mêmes affectées par la crise.
Quelles sont les perspectives ?
Les prix du marché se sont redressés bien que les exportateurs ne soient pas revenus. Pour la prochaine campagne, nous renforçons les liens d’affaires avec les transformateurs locaux. Ils ont absorbé une bonne partie de la production. Nous souhaitons établir avec eux des partenariats durables pour ne plus être à la merci d’annulations de contrat.
L’URCPA est engagée dans un partenariat responsable, appuyé par Afdi, avec le transformateur local Tolaro Global. A-t-il été impacté par la crise ?
Ce partenariat responsable vise principalement à approvisionner l’usine de transformation en noix brute de cajou certifiées bio-équitables. Il a subi un coup car il dépend du marché international. L’usine de transformation a dû fermer ses portes et revoir ses ambitions en termes de volume de noix à transformer au cours de la saison ; ce qui s’est répercuté sur les engagement contractuels.
Les conditions sont-elles différentes pour la production bio ?
La chute des prix concerne aussi le bio. Le différentiel de prix à la vente, habituellement de 45 FCFA n’a pas été maintenu. Pour le bio, l’avantage de se tourner vers les transformateurs locaux, que l’on connait, c’est de pouvoir ajuster l’objectif de production en fonction de la demande attendue.
La crise a-t-elle affecté les services aux membres rendus par l’URCPA ?
Les 18 conseillers agricoles ont continué le conseil sur le terrain mais en réduisant à 10 le nombre de coopérateurs présents aux réunions et en portant des masques. Pour ce qui est de l’équipe administrative, nous avons eu recours au télétravail avec des rotations pour assurer la permanence. Nous avons établi le port de masque et mis en place un dispositif de lavage de mains. A chaque rencontre, les techniciens sensibilisent aux gestes barrières. Nous diffusons aussi des messages aux administrateurs via whatsapp.
L’Union régionale des coopératives de producteurs d’anacarde de l’Atacora Donga (URCPA-AD), réunit 4492 agriculteurs et produit 40% du volume de noix de cajou de la région du nord-ouest du Bénin. Elle organise la vente groupée afin d’obtenir un meilleur prix de vente pour les producteurs. Depuis 2012, l’URCPA encourage le développement du bio équitable pour valoriser la filière. En 2019, Afdi l’a accompagnée dans la conversion de 1000 nouveaux producteurs. L’OP est engagée dans un partenariat économique responsable avec le transformateur local Tolaro Global.